Bois : un marché qui pèse 200 milliards de dollars
Sylvain Mathon extrait de l’édito matières premières
Voilà quelques temps que je vous promets un point sectoriel sur le bois... Dans le sillage de la théorie du découplage évoquée dans l'Edito, le moment me semble bien choisi pour nous pencher sur cette ressource.
1% du PIB mondial et 3% des volumes d'échange internationaux, 200 milliards de dollars
Selon les estimations de la FAO (Food and Agriculture Organization), le secteur mondial des produits forestiers représente environ 1% du PIB mondial et 3% des volumes d'échange internationaux, pour un chiffre d'affaires annuel dépassant les 200 milliards de dollars.
Le bois est aussi la plus ancienne et reste la plus importante source d'énergie et de développement du monde : la prospérité de l'Occident s'est bâtie sur la forêt. Aujourd'hui encore, 600 millions de personnes pauvres au moins en dépendent directement pour leur survie. C'est dire que nous parlons d'un secteur stratégique...
Une filière hétérogène et spécialisée
Les volumes produits annuellement dans le monde dépassent les trois milliards de mètres carrés, pour des débouchés dans la construction, l'ameublement, l'emballage, les produits papetiers et l'énergie.
La filière est hétérogène et spécialisée : le bois-papier, par exemple, où dominent en Europe des géants scandinaves comme le Finlandais Enso Stora, est un secteur à part entière.
Sachez que l'on distingue entre bois tropicaux et tempérés, et entre les modes de transformation de la matière première : le "bois rond", bois brut à vocation surtout industrielle, est issu des grumes, c'est-à-dire des troncs ébranchés, livrés encore recouverts d'écorce ; tandis que les diverses transformations du bois -- sciages, panneaux agglomérés, etc. -- présentent des marges beaucoup plus avantageuses.
A l'échelle mondiale, le commerce du bois rond reste dominant en volume, les importateurs préférant évidemment transformer le bois chez eux.
Transformer le bois sur place pour maximiser la marge
Ce contrôle de la transformation est un enjeu majeur pour l'évolution de la filière. Certains pays tropicaux, comme le Brésil, l'Indonésie, ou Madagascar jusqu'à cette année, ont interdit le commerce de grumes pour exporter seulement des produits de sciage : mais ils doivent lutter contre de puissants marchés parallèles.
On estime que les populations exploitantes touchent en moyenne 12 cents par dollar sur le prix de la grume exportée... Laquelle, une fois transformée, verra son prix bondir d'un facteur 10.
Les grands producteurs
Les grands producteurs de bois tempéré sont les Etats-Unis, l'ex-URSS, la Chine et le Canada. En matière de bois tropical, c'est l'Asie qui tient le haut du pavé : Brésil, Inde, Indonésie, Malaisie et Chine.
La demande est tirée par l'Asie
Quant à la demande, elle est tirée par l'Asie à plus de 40%. Les grands consommateurs sont les Etats-Unis, la Chine, l'Union européenne et le Japon.
Deux géants se détachent dans ce panorama : les Etats-Unis et la Chine, forts tous les deux d'un marché de la construction extrêmement dynamique -- du moins, jusqu'à une date récente pour les Etats-Unis. Mais c'est bien sûr l'empire du Milieu qui, une fois de plus, retient notre attention. En l'espace d'une décennie, l'émergence de la Chine a complètement bouleversé le secteur mondial du bois.
Quand le Dragon fait feu de tout bois...
La Chine, pays le plus "déforesté" au monde, compte parmi les plus gros importateurs de grumes -- pour son marché intérieur de la construction -- et, en même temps, parmi les plus gros exportateurs de bois de la planète, en grande partie sous la forme de mobilier. L'histoire de son irrésistible ascension est impressionnante.
La déforestation : un véritable danger
Ce sont les inondations du Yang Tsé, à l'été 1998, qui ont donné le vrai coup d'accélérateur : elles ont fait des milliers de morts et 14 millions de sans-logis. Face à l'ampleur de la catastrophe, Pékin prit brusquement conscience des dangers de la déforestation qui se déroulait, à un rythme affolant, le long du fleuve, dans des régions à dominantes rizicole et sylvicole.
Le pouvoir central opère un virage à 90°
En conséquence, le gouvernement fit protéger de vastes sections de forêt, leva les barrières douanières à l'importation de bois et entreprit de sécuriser ses approvisionnements de grumes en Nouvelle-Guinée, en Birmanie, en Indonésie et en Russie. La Nouvelle-Zélande, les îles Salomon et le Gabon sont venus depuis s'ajouter à la liste ; et la Russie a pris une place prépondérante dans les achats chinois.
Depuis, le compteur est bloqué au rouge
Les volumes d'importations de bois par la Chine se sont multipliés par quatre, en se renforçant dans le domaine du bois tempéré, et assurant du même coup à l'industrie chinoise du bois (meubles, parquets) une hégémonie mondiale.
Ainsi, le volume de production de panneaux de fibres est passé de 650 000 mètres carrés au milieu des années 90 à quelque 20 millions de mètres carrés l'année dernière ; sur la même période, les volumes d'aggloméré ont quintuplé.
La Chine, plus gros menuisier de la planète
Les exportations de bois transformé par l'empire du Milieu représentent, en volume, 70% de ses importations. Sur les marchés des Etats-Unis et d'Europe, les importations de produits en bois transformé en Chine ont augmenté de 700% à 900% entre 1997 et 2005...
Sans parler des marchés émergents d'Afrique et d'Asie, où le Dragon est très bien positionné.
pourquoi je crois en ce marché et ce que l'analyse technique nous apprend.
BOIS : UN MARCHE QUI PESE 200 MILLIARDS DE DOLLARS -- 2ème PARTIE
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Par Sylvain Mathon (*)
La demande est tirée par l'Asie
La demande de bois est tirée par l'Asie à plus de 40%. Les grands consommateurs sont les Etats-Unis, la Chine, l'Union européenne et le Japon.
Deux géants se détachent dans ce panorama : les Etats-Unis et la Chine, forts tous les deux d'un marché de la construction extrêmement dynamique -- du moins, jusqu'à une date récente pour les Etats-Unis. Mais c'est bien sûr l'empire du Milieu qui, une fois de plus, retient notre attention. En l'espace d'une décennie, l'émergence de la Chine a complètement bouleversé le secteur mondial du bois.
Quand le Dragon fait feu de tout bois...
La Chine, pays le plus "déforesté" au monde, compte parmi les plus gros importateurs de grumes -- pour son marché intérieur de la construction -- et, en même temps, parmi les plus gros exportateurs de bois de la planète, en grande partie sous la forme de mobilier. L'histoire de son irrésistible ascension est impressionnante.
La déforestation : un véritable danger
Ce sont les inondations du Yang Tsé, à l'été 1998, qui ont donné le vrai coup d'accélérateur : elles ont fait des milliers de morts et 14 millions de sans-logis. Face à l'ampleur de la catastrophe, Pékin prit brusquement conscience des dangers de la déforestation qui se déroulait, à un rythme affolant, le long du fleuve, dans des régions à dominantes rizicole et sylvicole.
Le pouvoir central opère un virage à 90°
En conséquence, le gouvernement fit protéger de vastes sections de forêt, leva les barrières douanières à l'importation de bois et entreprit de sécuriser ses approvisionnements de grumes en Nouvelle-Guinée, en Birmanie, en Indonésie et en Russie. La Nouvelle-Zélande, les îles Salomon et le Gabon sont venus depuis s'ajouter à la liste ; et la Russie a pris une place prépondérante dans les achats chinois.
Depuis, le compteur est bloqué au rouge
Les volumes d'importations de bois par la Chine se sont multipliés par quatre, en se renforçant dans le domaine du bois tempéré, et assurant du même coup à l'industrie chinoise du bois (meubles, parquets) une hégémonie mondiale.
Ainsi, le volume de production de panneaux de fibres est passé de 650 000 mètres carrés au milieu des années 90 à quelque 20 millions de mètres carrés l'année dernière ; sur la même période, les volumes d'aggloméré ont quintuplé.
La Chine, plus gros menuisier de la planète
Les exportations de bois transformé par l'empire du Milieu représentent, en volume, 70% de ses importations. Sur les marchés des Etats-Unis et d'Europe, les importations de produits en bois transformé en Chine ont augmenté de 700% à 900% entre 1997 et 2005... Sans parler des marchés émergents d'Afrique et d'Asie, où le Dragon est très bien positionné.
Meilleures salutations,
Sylvain Mathon
Pour la Chronique Agora